Les ministres africains des Finances, de la Planification et du Développement économique ont appelé à des réformes visant à renforcer le modèle de fonctionnement, les instruments de prêt et la structure de gouvernance du Fonds monétaire international (FMI) afin de faire face de façon plus efficace aux chocs exogènes mondiaux tels que la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et la crise climatique en cours.
L’appel aux réformes a été lancé, selon le mensuel d’analyse panafricain Afrimag, lors d’une réunion du Groupe de travail africain de haut niveau sur l’architecture financière mondiale en marge des réunions de printemps de 2023 organisées par le Groupe de la Banque mondiale (GBM) et le Fonds monétaire international (FMI) qui se tiennent à Washington D.C.
Le Groupe de travail de haut niveau, coordonné par la Commission économique pour l’Afrique (CEA), comprend les ministres africains des Finances, de la Planification et du Développement économique, l’Union africaine, la Banque africaine de développement, Afreximbank et la Banque mondiale, avec la participation du personnel et des directeurs exécutifs du FMI. Le Groupe sert de forum pour élaborer des propositions de réforme de l’architecture financière mondiale et renforcer la voix africaine sur la scène mondiale.
La Secrétaire exécutive adjointe et Économiste en chef de la CEA, Mme Hanan Morsy, a souligné la nécessité de défendre «des demandes concrètes et réalisables qui peuvent être rapidement mises en œuvre tout en dénonçant les déséquilibres structurels qui nécessitent une approche de réforme à plus long terme.»
Assurer la disponibilité des prêts
Les ministres se sont dit profondément préoccupés par le manque de ressources du Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (PRGT) du FMI, qui accorde des prêts concessionnels aux Pays à faible revenu. Ils ont appelé à une action immédiate pour augmenter les promesses de financement du PRGT afin d’en assurer sa durabilité à long terme. En outre, des appels ont été lancés pour mettre fin au remboursement des frais administratifs du PRGT et pour vendre une partie des réserves d’or du FMI à moyen terme afin d’accroître la disponibilité des financements.
Les ministres ont souligné la nécessité de revoir les limites d’accès à mesure que les ressources deviennent disponibles. Plus précisément, ils ont demandé une augmentation de la limite d’accès annuelle du PRGT à 200 % du quota et de la limite d’accès cumulée à 600 % du quota – conformément aux augmentations récemment convenues pour les limites d’accès au Compte des ressources générales (GRA).
Le Groupe a également noté la forte utilisation des facilités de prêt d’urgence du FMI – la Facilité de crédit rapide (RCF) et l’Instrument de financement rapide (RFI) – par les pays qui répondent à la pandémie de Covid-19. Le doublement temporaire des limites d’accès annuelles à ces facilités, d’avril 2020 à décembre 2021, a libéré d’importantes sommes de liquidités. Dans le contexte des multiples crises actuelles, les ministres ont exhorté le FMI à relever les limites d’accès annuelles du RCF et du RFI de 50 % à 100 % de la quote-part tout en maintenant les limites d’accès cumulées plus élevées, soit à 150 % de la quote-part jusqu’à au moins la fin de 2024.
Améliorer les conditions de prêt
Des prêts à faible taux d’intérêt et à longue échéance sont nécessaires compte tenu des besoins importants d’investissement à long terme des pays pour atteindre les ODD et lutter contre le changement climatique. Le Groupe a reconnu l’importance du Fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité du FMI afin de fournir un financement à plus long terme. Cependant, les hausses des taux d’intérêt dans le monde ont entraîné une augmentation du taux d’intérêt du DTS, ce qui a entraîné une augmentation des frais d’intérêt sur les prêts du FMI accessibles par l’intermédiaire du RST. Le Groupe a demandé le plafonnement du taux d’intérêt du DTS dans le cadre du RST, en particulier pour les pays à faible revenu, et la mobilisation de ressources supplémentaires pour le RST.
Le Groupe a également exprimé ses inquiétudes quant aux surtaxes du FMI, qui sont des paiements d’intérêts supplémentaires dus sur d’importants prêts GRA en cours. Un certain nombre de pays africains subissent des surtaxes alors qu’ils sont confrontés à des conditions économiques difficiles dans un contexte de chocs mondiaux ; les ministres ont donc demandé la suspension ou la suppression des surtaxes pendant deux à trois ans.
Remédier aux déséquilibres systémiques
Les ministres ont souligné l’importance de remédier aux déséquilibres des quotas. Ils ont noté que la formule actuelle des quotes-parts du FMI entraîne une sous-allocation des quotes-parts aux pays à revenu faible et intermédiaire, réduisant ainsi leur représentation dans la prise de décision et affaiblissant l’efficacité du système de DTS. Par exemple, malgré une population de plus de 1,4 milliard d’habitants, le quota de l’Afrique est inférieur à celui de l’Allemagne, qui ne compte que 83 millions d’habitants. Les ministres ont ainsi appelé à une réforme de la formule des quotas, y compris de la réduction du poids accordé aux catégories actuelles de la formule «ouverture» et «réserves» et de l’inclusion d’une nouvelle catégorie qui saisisse «l’exposition» ou la «vulnérabilité». La révision des quotes-parts du FMI en 2023 offre l’occasion de remédier à ces déséquilibres.
Les ministres ont également exhorté le FMI à étendre son travail en matière de plaidoyer et de politique sur les déséquilibres mondiaux, notamment en préconisant des ajustements politiques dans les pays ayant un excédent de compte courant et en renforçant les déséquilibres mondiaux, notamment en plaidant pour des ajustements politiques dans les pays ayant un excédent de compte courant et en renforçant les directives de Gestion des flux de capitaux/mesures macroprudentielles (CFM / MPM) pour les pays déficitaires. Une analyse plus approfondie serait utile sur l’application potentielle d’une redevance d’accès au marché, d’une taxe Tobin ou d’autres mesures correctives fiscales pour freiner les échanges transfrontaliers improductifs.
Appel à l’action
Les ministres ont souligné qu’il est important que 2023 soit une année d’action tout en mettant en avant les nombreuses bonnes idées qui existent mais qui doivent être mises en œuvre. Ils ont mentionné les évènements à venir, notamment le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial en juin, le Sommet sur l’action climatique, le Sommet sur l’ambition climatique et le Sommet sur les ODD en septembre, comme des opportunités cruciales pour parvenir collectivement au changement et construire un avenir durable et prospère pour L’Afrique et le monde.
CEA
Créée en 1958 par le Conseil économique et social (ECOSOC) des Nations Unies, la CEA est l’une des cinq commissions régionales de l’Institution et a pour mandat d’appuyer le développement économique et social de ses États membres, d’encourager l’intégration régionale et de promouvoir la coopération internationale pour le développement de l’Afrique.
Composée de 54 États membres, la Commission économique pour l’Afrique (CEA) joue un double rôle en tant qu’organisme régional de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et en tant que partie intégrante du paysage institutionnel régional en Afrique.