Amener l’Etat du Sénégal à autoriser l’administration de produits contraceptifs tels que le DMPA-SC dans les pharmacies privées. C’est là le projet partagé, ce jeudi, avec la presse-santé par l’ONG Action Et Développement (AcDev) qui le porte depuis huit mois, maintenant.
Mais un obstacle majeur se dresse devant elle. Car, bien que les pharmaciens soient formés dans l’administration des injections, la loi ne leur permet pas d’en administrer.
« Le Ministère de la santé doit aider à faire en sorte que dans les pharmacies privées les pharmaciens et employés de pharmacies aient le droit d’administrer le DMPA-SC y compris l’initiation des clientes à l’auto-injection », a plaidé Momar Talla Seck, responsable du projet de plaidoyer règlementaire pour l’extension de l’offre de services du DMPA-SC dans les pharmacies privées du Sénégal.
Le DMPA est un contraceptif progestatif courant qui signifie « dépôt médroxyprogestérone acétate » (en anglais), et « acétate de médroxyprogestérone dépôt » (en français). Il existe en deux modes d’administration : Intramusculaire et sous cutané.
Ce nouvel injectable a permis de mettre en évidence son potentiel à attirer de nouvelles utilisatrices de la planification familiale et à donner aux femmes plus d’autonomie et de contrôle sur leurs décisions de planification familiale.
Des pays africains comme la Côte d’Ivoire, la Zambie, le Nigeria, le Niger etc. tirent grand bien dans l’offre des méthodes contraceptives dans les pharmacies et dans les dépôts de vente de médicaments parce que reconnue comme une intervention à haut impact prometteuse et implémentée.
Au Sénégal, il est déjà offert par les prestataires dans les structures publiques d’offre de services, dans certaines cliniques privées et les cliniques privées des ONG AcDev, ASBEF, MSI, etc. et également au niveau communautaire dans les cases de santé. Il n’est aussi distribué dans les pharmacies privées (officines) que pour la vente uniquement.
« L’injection de ces produits, ce n’est pas compliqué, c’est comme quand on utilise l’insuline. On ne peut pas comprendre qu’on puisse autoriser les Agents de santé communautaire (ASC) à faire ce genre de prestation, et qu’on l’interdise aux pharmaciens qui, en 4ème année d’études, ont acquis des connaissances en soins infirmiers. C’est une aberration », a regretté M. Seck.
L’objectif d’AcDev à travers ce projet est de contribuer à l’augmentation du taux de prévalence contraceptive au Sénégal qui se situe actuellement à 26%.
L’Enquête démographique et de santé EDS-2019 au Sénégal révèle que les pharmacies constituent la première source d’approvisionnement en contraceptifs modernes au sein du secteur privé de la santé.
L’offre d’injectables aux clientes de PF volontaire par les pharmacies privées est inscrite au rang des interventions à haut impact sur la planification familiale (PF), afin d’atteindre l’objectif de 46% de taux de prévalence contraceptive (TPC) en 2026 et de réduire les besoins non satisfaits de 25,2% à 10%. Tout ceci, dans le but de baisser la mortalité maternelle et d’accélérer la transition démographique pour un Sénégal émergent en 2035, relève M. Seck.
L’impossibilité d’être sous contraception et son corolaire de malheurs
Sur 1,9 milliard de femmes en âge de procréer (15-49 ans) dans le monde, 1,1 milliard ont besoin de planification familiale ; parmi celles-ci, 842 millions utilisent des méthodes de contraception, et 270 millions n’ont pas accès à la contraception dont elles ont besoin, souligne un rapport de l’Organisation mondiale de la santé, publié en 2019.
Pourtant, 214 millions de femmes et de filles ont un besoin de contraception non satisfait, ce qui signifie qu’elles veulent éviter ou retarder une grossesse mais n’utilisent aucune méthode contraceptive.
Selon la même source, ce besoin non satisfait entraîne 111 millions de grossesses non désirées chaque année, ce qui représente 49 % de toutes les grossesses dans les pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI).
Ainsi en Afrique, 24 % de personnes n’ont pas accès à la planification familiale. Plus de 100 000 femmes en Afrique de l’Ouest et du Centre meurent chaque année des causes liées à la grossesse évitable, plus que dans toute autre région du monde, ajoute au même moment une étude de l’UNFPA.