Après la Grande-Bretagne en début de semaine, la Côte d’Ivoire annonce le retrait progressif de ses militaires et policiers engagés au sein de la Minusma, la Mission de l’ONU au Mali. Au total, 850 éléments déployés depuis 2014.
Officiellement, pointe le site d’information ivoirien Yeclo, « les autorités ivoiriennes n’ont pas expliqué les raisons de ce retrait. Toutefois, précise-t-il, les relations étaient tendues entre le Mali et la Côte d’Ivoire depuis l’arrestation des 49 militaires ivoiriens à Bamako le 10 juillet dernier, accusés d’être des mercenaires par les autorités maliennes. »
Pour L’Infodrome, autre site d’information ivoirien, c’est clair : c’est bien l’affaire des soldats détenus au Mali qui a motivé la décision d’Abidjan. En effet, jusqu’à présent, les pourparlers entre les deux pays n’ont rien donné ou presque. « Plusieurs médiations ont eu lieu sous la houlette du Togo, rappelle L’Infodrome. Trois femmes soldats ont pu recouvrer la liberté et regagner Abidjan. (Ensuite) malheureusement, les négociations ont accouché d’une souris. Exaspérée, poursuit le site, la Côte d’Ivoire a (donc) décidé de mettre fin à sa participation aux missions de maintien de la paix au Mali. »
Abidjan échaudé…
En fait, croit savoir Jeune Afrique, « côté ivoirien, cela fait plusieurs mois que la réflexion sur un retrait de la Minusma a été amorcée. Sur la même ligne que ses partenaires européens, le gouvernement ivoirien était échaudé par la décision des autorités de transition maliennes de rompre avec la France et l’Union européenne pour se rapprocher de la Russie, en faisant notamment appel aux mercenaires de la société militaire privée Wagner. L’arrestation des 49 soldats ivoiriens à l’aéroport de Bamako, le 10 juillet, n’a évidemment pas arrangé les choses. À l’époque, précise encore JA, certains de ses proches – en particulier parmi les militaires – avaient même pressé Alassane Ouattara de retirer immédiatement ses troupes de la Minusma en mesure de rétorsion. Le président ivoirien n’y avait finalement pas cédé, et avait maintenu ses Casques bleus chez son voisin. Mais le maintien en détention des militaires n’a fait que tendre encore un peu plus les relations entre Abidjan et Bamako. »
Une « plaie béante »
« Le contingent ivoirien plie bagages », constate pour sa part Le Soft à Bamako. « La plaie entre Bamako et Abidjan devient de plus en plus béante, affirme le site malien. Alors que les deux capitales sont en pleine crise depuis l’éclatement de l’affaire des 49 militaires ivoiriens, le Gouvernement ivoirien annonce (donc) le retrait de ses troupes de la Minusma. »
« Un retrait diversement apprécié à Bamako », relève Maliweb qui cite quelques réactions glanées sur les réseaux sociaux : « les troupes onusiennes du Mali partiront d’elles-mêmes, les unes après les autres » ; « très bien, quand tous les ennemis de la paix auront quitté le Mali, la paix régnera pour toujours » ; ou encore, a contrario : « le problème du Mali n’est pas les forces étrangères, c’est plutôt la mauvaise gouvernance. Que les gouvernants arrêtent de piller ! »
Le début de la fin pour la Minusma ?
Alors, « est-ce le chant du cygne pour la Minusma ? », s’interroge Le Pays au Burkina Faso. « Il est difficile de ne pas le croire avec l’annonce du retrait britannique et ivoirien. Quand on sait qu’après le départ de Barkhane, plusieurs autres nations comme la Suède, l’Allemagne, le Danemark et le Bénin avaient annoncé le départ de leurs troupes, on ne peut que se conforter dans l’idée de l’imminence de la fin de la présence des Casques bleus au pays d’Assimi Goïta. » Ces retraits ajouteront « à l’isolement diplomatique du Mali, estime encore Le Pays, avec de lourdes conséquences politiques, économiques et sociales. »
L’Observateur Paalga est sur la même ligne : « on sait que la défense de la sécurité et de l’intégrité du Mali est l’affaire des Maliens eux-mêmes, mais en travaillant à faire le vide autour d’elles, les autorités maliennes compliquent un peu plus une situation qui n’est déjà pas bien reluisante. Surtout que malgré sa ‘montée en puissance’, si l’on croit la vulgate officielle de Koulouba, l’armée malienne n’est pas en mesure de combler le vide laissé par ses différents partenaires. »
Avec rfi.fr