Les producteurs maliens ne se font plus vraiment d’illusion : ils vont avoir beaucoup moins de coton à vendre cette année. Au moins quatre usines d’égrenage ont déjà fermé, à Sikasso, Kadiolo, et Kignan, alors qu’elles tournent d’ordinaire jusqu’en avril. Les autres pourraient avoir terminé l’égrenage d’ici fin février, selon un acteur de la filière au vu du peu de coton qu’il reste à traiter.
Une production sujette à débat
Plusieurs sources font état d’une production qui devrait difficilement dépasser les 400 000 tonnes. Pour la seule zone de Kadiolo, la production confirmée est de 9 000 tonnes, soit moins de la moitié de celle de l’année dernière. Du côté de la Compagnie cotonnière nationale, on s’accroche toujours à l’espoir d’obtenir entre 500 et 550 000 tonnes de coton. Toute la filière semble avoir désormais pris acte d’une production en chute par rapport à l’année dernière – 770 000 tonnes – mais les volumes attendus ne font pas encore consensus et sont presque devenus tabous selon plusieurs sources.
Ces divergences sont à l’image des tiraillements que connaît la filière. L’élection des instances de la Confédération des sociétés coopératives de producteurs de coton du Mali, par exemple, a été interrompue le 5 octobre 2022 et n’a pas été reprise depuis par le mandataire judiciaire nommé entre-temps. Yacouba Kone, le président du bureau partiel élu déplore la situation et accuse le PDG de la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT), en poste depuis novembre 2020, et donc installé par les militaires au pouvoir, de mauvaise gestion et de vouloir diviser les producteurs.
La CMDT peu bavarde
Un responsable de la Compagnie cotonnière joint par RFI réfute l’existence de tension, entre la direction et les producteurs, mais se refuse à tout autre commentaire. Le groupement de producteurs a lui, saisi fin décembre, son ministère de tutelle afin de trouver réponse à « l’indignation » de ses membres qui ont listé une série de doléances.
La confédération de producteurs prévient, « l’État ne peut pas nous obliger à cultiver du coton l’année prochaine ». Sous-entendu, rien n’est acquis pour la campagne 2023/2024 si un terrain d’entente n’est pas trouvé.
Les producteurs savent qu’ils se préparent dans tous les cas à des mois difficiles : à cause du manque de coton, ils ne pourront pas rembourser tous les crédits dus à la CMDT.
Ils craignent aussi que la situation actuelle ne déborde sur l’année prochaine : la livraison des engrais pourrait en effet prendre du retard : les intrants sont livrés par les camions qui viennent charger le coton. Une récolte en chute, pourrait impliquer moins de rotation par la route, explique un négociant français qui partage lui aussi l’inquiétude des producteurs.
Avec rfi.fr