Des pommes de terre en plein désert. Depuis plus de vingt ans, Hesham el-Naggar exploite la ferme Selma, à 80 km au sud-ouest d’Alexandrie. Il fait également pousser des agrumes, de l’ail, des patates douces à destination de l’Europe. Et pour cela, il utilise beaucoup d’eau venant des nappes phréatiques. « C’est ce que l’on appelle de l’irrigation par pivot, ça crée le même effet que la pluie. Ce n’est pas la meilleure manière d’utiliser l’eau, mais c’est commun en Égypte et ce sera utilisé de manière plus intensive encore », indique Hesham el-Naggar.
À 100 kilomètres plus à l’est, dans le Delta, cette région dont la crue du Nil a permis le développement de l’agriculture depuis l’Antiquité, les paysans traditionnels souffrent. Avec la montée du niveau de la mer, les terres sont gorgées de sels, comme celles de Sobhy. « Ces dernières années, le sel est apparu. Depuis, nous manquons d’eau. Par exemple, on peut arroser les terres pendant quatre jours et ne pas en avoir pendant huit. Regardez l’état des plantes, ça cause des problèmes », montre-t-il. Puis Sobhy ajoute : « Je suis né ici, mais s’il n’y a plus rien, où vais-je aller ? Je vais devoir tout quitter et partir. C’est fini, je vais devoir tenter ma chance ailleurs. »
Des ressources en eau qui « vont devenir de plus en plus rares »
Conscient des ressources en eau limitées de l’Égypte, dont 80 % est utilisée pour l’agriculture, le gouvernement a investi massivement, avec l’aide de fonds internationaux, dans des stations d’épuration. Celle de Gabal Asfar, au nord-est du Caire, est la plus grande en Afrique et au Moyen-Orient. Chaque jour, elle retraite les eaux usées de 12 millions d’habitants, plus de la moitié de la population du Caire.
Atika Ben Maid est responsable du pôle ressources naturelles et finance durable à l’Agence française de développement, qui participe à l’extension de Gabal Asfar. Elle explique qu’« en Égypte, les ressources en eau sont déjà rares et elles vont devenir de plus en plus en rares. Donc, il faut trouver, quand on partage les ressources existantes entre l’eau potable et l’agriculture, il faut trouver des nouvelles ressources pour l’agriculture. Ces eaux usées, traitées, elles peuvent être utilisées de manière totalement sûre pour irriguer des productions agricoles qui seront ensuite utilisées pour l’alimentation. »
Dans un pays qui a toujours compté sur le Nil pour assurer sa subsistance, l’Égypte va devoir accélérer une gestion durable de l’eau. D’autant que sa population de 109 millions d’habitants aujourd’hui pourrait atteindre 160 millions d’ici à 2050.
Avec rfi.fr