Au Conseil Café Cacao (CCC), on insiste sur un point : depuis 2018, aucune nouvelle plantation n’a été créée. « Cette règlementation de l’Union européenne n’affecte pas nos productions de cacao », affirme confiant, un cadre de cette institution.
Une « carte de paysan »
Récemment, le CCC a mis en place plusieurs mesures pour instaurer de la traçabilité dans le secteur, avec notamment, la distribution d’une carte de paysan.
D’après le ministre de l’Agriculture, Kobénan Adjoumani, interrogé par notre correspondante à Abdijan, Bineta Diagne, seuls les planteurs ainsi recensés pourront exporter vers l’Union européenne. « Nous avons pu recenser 993 031 producteurs et nous avons pu géolocaliser 3 220 800 ha de café et de cacao, indique le ministre. Lorsque vos vergers sont identifiés, nous (vous) donnons une carte multifonction, qui dispose d’un code QR renfermant toutes les informations sur le producteur et son verger.
Il peut y avoir des personnes qui s’installent de façon illicite dans les forêts classées, reconnaît le ministre d’Etat, mais dès lors que nous avons décidé de géolocaliser les plantations, de recenser les gens qui vont désormais disposer de carte, la traçabilité est faite ».
Quid des planteurs installés dans les zones classées ? Koffi Kanga, le président de l’Association nationale de Producteurs de café cacao (Anaproci), craint un durcissement des mesures de contrôle sur le terrain. Ce responsable réclame des mesures d’accompagnement pour ces planteurs qui sont, selon ses mots, « bannis du système ». Il reste encore plus noeuds à trancher pour améliorer le cadre juridique de ce système, précise encore un observateur.
« Il n’a rien qui ressemble plus à une fève produite en forêt classée qu’une fève produite dans le domaine dit rural ! »
François Ruf, expert en économie cacaoyère, doute de l’applicabilité d’une telle législation, au micro d’Olivier Rogez, du service Économie. Les entreprises commercialisant ces produits devront produire des informations vérifiables prouvant qu’ils n’ont pas été cultivés sur des terres déboisées après 2020. Mais « c’est très illusoire, parce que cela voudrait dire qu’il y a une traçabilité parfaite et que l’Europe serait capable de déterminer si une fève de cacao ou un sac de cacao, vient d’une plantation qui a été créée il y a plusieurs années et non pas sur une parcelle qui a été défrichée après la date qu’ils ont choisie en 2020. C’est impossible à déterminer dans le contexte actuel des pays comme la Côte d’Ivoire et le Ghana. Je vous donne un exemple : depuis trois ans, on essaie de se battre et d’alerter les politiques publiques sur la disparition de l’une des plus belles forêts classées du pays et une des dernières, la Bossematié. Ces anciennes forêts produisent du cacao en masse ; le cacao sort par des pistes piétonnières et une fois qu’il est sorti du périmètre de la forêt classée, il est mélangé avec le reste ; et il n’a rien qui ressemble plus à une fève produite en forêt classée qu’une fève produite dans le domaine dit rural ! ».
Avec rfi.fr