Au Sénégal, la santé et l’hygiène menstruelle restent des sujets tabous, souvent entourés de stigmatisation. Beaucoup de jeunes filles atteignent la puberté sans avoir de connaissances suffisantes sur leurs règles, ce qui engendre souvent peur, honte, et exclusion sociale. Le manque d’accès à des infrastructures adaptées et à des produits sanitaires accentue ces défis, compromettant parfois leur éducation.
Ces défis sont exacerbés dans notre pays par des perceptions négatives des menstruations, souvent considérées comme impures ou ‘’sales’’. Ces croyances stigmatisantes conduisent de nombreuses jeunes filles à s’exclure des activités scolaires et sociales pendant leurs règles, compromettant ainsi leur avenir éducatif et leur épanouissement personnel.
Pour lutter contre les discriminations liées au genre et améliorer l’accès aux soins menstruels, l’Association des journalistes en santé, population et développement (AJSPD), dans le cadre du projet ‘’Santé en lumière’’ en collaboration avec la Fondation Bill et Mélinda Gates, a organisé ce mercredi 16 avril un « Amphi pédagogique » sur l’hygiène menstruelle au Lycée John Fitzgerald Kennedy, afin de sensibiliser les élèves de cet établissement emblématique formant l’élite féminine sénégalaise.
Selon le président de cette plateforme de journalistes, Eugène Kaly, cette initiative vise surtout « à déconstruire les stéréotypes, promouvoir une gestion hygiénique des règles et fournir des ressources matérielles aux élèves pour leur épanouissement ».
Pour l’occasion, Ramatoulaye Diouf Samb, membre de l’Association nationale des sages-femmes d’Etat du Sénégal, citant une étude récente, a souligné, dans son exposé face aux filles, qu’un peu plus de huit sur dix (83, 26%) des filles au Sénégal n’ont pas été préparées par leurs parents et par l’école à voir leurs premières menstruations couramment appelées « règles ». Chose qui a tendance à affecter les adolescentes sur le plan psychologique.
« Pour la plupart, elles sont perturbées car nos parents, d’habitude, ne veulent pas en parler. Et quand on en parle, c’est en mal. Ça reflète la saleté. On vous dit qu’une fille ou femme qui voit ses règles ne peut pas être à l’école, ou bien ne peut pas préparer à manger ou servir à boire, par exemple ; quelqu’un qui voit ses règles doit s’isoler. Or, c’est quelque chose qui est normale, qui fait partie de la femme, qui fait partie de la fille » a-t-elle indiqué, avant d’appeler les parents et l’école à préparer les filles à accueillir leurs premières règles.
La menstruation, couramment appelée les règles, est l’écoulement périodique et temporaire par le vagin d’un mélange composé de sang, de sécrétions vaginales, et de cellules de la paroi utérine. Les premières menstruations apparaissent à un âge variable selon les individus, estimé entre 12 et 13 ans. Elles peuvent toutefois survenir beaucoup plus tôt ou beaucoup plus tard, sans que cela ne soit révélateur d’une affection.
500 millions de personnes menstruées sans accès aux ressources nécessaires
D’après la sage-femme, le danger du tabou entretenu sur les menstruées, associé « aux fausses croyances » compromettent de manière dangereuse la santé des filles au fil du temps. « Les filles qui vivent leurs menstrues sous le poids de la honte ou des stéréotypes encourent un sérieux danger lié aux infections urinaires ; des infections qui peuvent créer des problèmes de santé de la reproduction », a alerté Ramatoulaye Diouf Samb.
Elle a, dans le même souffle, révélé que dans certaines contrées lointaines du Sénégal, des filles utilisent des morceaux de tissus usés, des feuilles de papiers ou s’isolent pour gérer leurs menstrues.
Environ 500 millions de personnes menstruées dans le monde n’ont pas accès aux ressources nécessaires pour gérer leurs règles en toute dignité, a relevé la plateforme des journalistes spécialisés en santé qui, dans sa manière de lutter contre la précarité menstruelle, a fourni aux élèves des outils pratiques, notamment une centaine de paquets de serviettes hygiéniques, pour gérer leurs menstruations dans la dignité.
La question de l’hygiène menstruelle occupe une place importante au Lycée John Fitzgerald Kennedy qui accueille des filles âgées entre 11 et 19 ans. « Nous avons mis en place un dispositif avec déjà beaucoup de blocs sanitaires, grâce surtout à la Douane sénégalaise qui nous a accompagnés pour qu’on puisse augmenter le nombre sanitaire », a fait savoir la proviseure Sarah Fatimata Sow. A l’en croire, le réseau d’adduction d’eau a été rénové grâce à l’entremise des parents d’élèves. « C’est un intrant de qualité pour la gestion de l’hygiène menstruelle. Aussi nous faisons de sorte que chaque fois qu’une fille a besoin d’une serviette, qu’elle en trouve quelque part au niveau des surveillantes ou au niveau de l’infirmerie », a-t-elle ajouté.
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