Longtemps considérée comme un pilier du financement international, l’aide publique au développement (APD) traverse une zone de turbulences. Aux États-Unis, l’USAID est mise en pause, tandis qu’en Europe, les restrictions budgétaires se multiplient. Le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la France ont réduit leurs engagements, entraînant un resserrement des ressources disponibles pour les pays du Sud. Lors du 5ᵉ Forum Finance en Commun à Cape Town, Papa Amadou Sarr, directeur exécutif Mobilisation, Partenariats et Communication de l’Agence française de développement (AFD) et ancien ministre sénégalais chargé de l’Entrepreneuriat des femmes et des jeunes, revient sur les défis actuels, la montée des cofinancements et la nécessité d’un nouveau modèle d’investissement solidaire.
Dans un entretien accordé à l’Agence Ecofin, il soutient qu’aujourd’hui, plus que jamais, l’aide au développement n’est plus vendeuse. « Ce n’est plus une priorité politique pour de nombreux gouvernements donateurs. Que ce soit en Europe ou aux États-Unis, son attrait s’est considérablement réduit. Nous l’avons vu récemment avec la mise en pause de l’USAID, qui affecte de nombreux projets en Afrique, en Asie et en Amérique latine. De plus, les coupes budgétaires sont massives : le Royaume-Uni a réduit son budget d’aide de plus de 4 milliards de livres sterling, les Pays-Bas d’un tiers, et la France a dû revoir à la baisse certaines enveloppes, notamment sur le programme 209, qui finance les projets de l’AFD », dit-il.
A l’en croire, deux facteurs expliquent cette tendance. Le premier est ce que l’on appelle la fatigue de l’aide. Depuis plus d’une décennie, des voix critiques, comme celle de Dambisa Moyo dans Dead Aid, dénoncent une aide inefficace, qui bénéficierait plus aux pays donateurs qu’aux populations locales. Cette perception a influencé l’opinion publique et certains décideurs.
Le second facteur est politique. La montée des gouvernements conservateurs et populistes en Europe et en Amérique du Nord a accentué le repli sur soi. Ces gouvernements, souvent hostiles à la solidarité internationale, remettent en question l’intérêt même de l’aide