Le canal de Suez, véritable poumon du commerce maritime mondial, a connu en 2024 une année marquée par des pertes sans précédent. Avec une baisse de 60 % de son trafic habituel, les conséquences économiques pour l’Égypte et le commerce international sont immenses. Retour sur une crise qui bouleverse les équilibres du transport maritime.
Les causes de la chute du trafic
Depuis plus d’un an, le canal de Suez subit les répercussions des attaques répétées des rebelles houthis en mer Rouge. Ces attaques ont poussé de nombreuses compagnies maritimes, dont le géant Maersk, à éviter cette route stratégique. Le détournement par le cap de Bonne-Espérance, bien que plus long et coûteux, est désormais privilégié par mesure de sécurité.
Par ailleurs, l’instabilité politique dans certaines régions proches du canal a également contribué à la diminution du trafic. Les tensions croissantes entre les pays riverains et les interventions militaires dans la région n’ont fait qu’aggraver la situation. Ces facteurs combinés ont instauré un climat de méfiance parmi les acteurs du commerce maritime.
Les rebelles houthis ont également ciblé des infrastructures stratégiques en mer Rouge, menaçant directement les navires commerciaux. Cette situation a incité les opérateurs maritimes à adopter des itinéraires alternatifs, accentuant le ralentissement du trafic par le canal de Suez. De plus, la communication autour de ces attaques a alimenté un sentiment d’insécurité parmi les investisseurs internationaux, affectant encore davantage la réputation de cette route commerciale clé.
Un impact économique colossal
En 2024, seulement 40 % du trafic habituel a été enregistré, entraînant un manque à gagner estimé à 7 milliards de dollars pour l’Égypte. Cette perte ne se limite pas au canal lui-même : les ports égyptiens ont également vu leur activité fortement diminuer, aggravant la crise économique du pays.
Les exportations et importations, qui dépendent en grande partie du canal, ont subi un ralentissement important. Cela a entraîné une hausse des prix des marchandises dans la région, accentuant les difficultés économiques pour les populations locales. En conséquence, les secteurs industriels et agricoles ont également été touchés, entraînant une baisse significative de la production nationale et des exportations.
Cette crise économique a exacerbé les tensions sociales en Égypte, où la population subit une inflation galopante et un taux de chômage en hausse. Les experts estiment que cette situation pourrait entraîner des répercussions à long terme sur la stabilité politique et économique du pays.
L’assurance, un facteur clé
La taille des navires empruntant le canal a drastiquement diminué. En effet, les compagnies d’assurance refusent de couvrir les grands porte-conteneurs en raison des risques élevés dans la région. Cette situation restreint le trafic à des navires plus petits, limitant ainsi la valeur des cargaisons transitant par le canal.
De plus, les primes d’assurance pour les navires empruntant cette route ont atteint des sommets, dissuadant davantage les opérateurs maritimes. Ces coûts supplémentaires se répercutent sur les consommateurs finaux, rendant les produits encore plus chers. Cette hausse des coûts logistiques a un effet domino sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, augmentant les délais de livraison et impactant négativement les économies dépendantes du commerce maritime.
En parallèle, certains armateurs ont investi dans des technologies de surveillance avancées pour sécuriser leurs cargaisons, mais ces solutions restent coûteuses et ne sont pas accessibles à tous les acteurs du secteur.
Des investissements en péril
Malgré la crise, l’Égypte avait lancé d’importants travaux d’élargissement du canal avant 2024. Ces efforts visaient à éviter de nouvelles crises, comme celle causée par l’échouement de l’Ever Given en 2021. Cependant, les retombées économiques de ces investissements restent compromises tant que la sécurité en mer Rouge n’est pas rétablie.
Les autorités égyptiennes ont également annoncé des initiatives pour renforcer la sécurité maritime, notamment avec l’aide de partenaires internationaux. Toutefois, ces mesures tardent à produire des résultats concrets, laissant planer une incertitude sur l’avenir du canal.
En outre, les investisseurs étrangers, qui jouent un rôle crucial dans le financement des projets d’infrastructure, se montrent réticents à engager des fonds dans un environnement marqué par l’instabilité. Cela met en péril plusieurs projets à long terme visant à moderniser les infrastructures portuaires et logistiques de l’Égypte.
Le rôle de la coopération internationale
Face à cette crise, la coopération internationale pourrait jouer un rôle clé dans la sécurisation de la région. Plusieurs pays et organisations ont exprimé leur volonté d’apporter un soutien technique et militaire pour protéger les navires empruntant le canal. Cependant, la mise en place de ces initiatives nécessite une coordination étroite entre les acteurs régionaux et internationaux.
Des sommets internationaux sur la sécurité maritime ont été organisés, mais les résultats concrets se font encore attendre. L’Égypte, en tant qu’acteur principal, doit renforcer son engagement pour mobiliser davantage de ressources et garantir la pérennité du canal.